Le si gentil monsieur Henry
Clotilde Bernos
Editions Thierry Magnier, 2006
On se doute bien que derrière ce titre, le Monsieur Henry en question n’est pas si gentil que ça. Camille ne s’y est pas trompée même si maman en a plein la bouche de ce professeur de chant, "il est si gentil"… Et d’abord, qu’est-ce qu’elle en sait elle, une fois que la porte se referme et qu’elle se retrouve en tête à tête avec lui ! Avec sa tête de tortue et ses dents qui brillent… Que sait-elle de la peur qui submerge Camille lorsqu’elle se retrouve en bas de son immeuble rance et qu’il faut passer le porche noir araignée et grimper les 163 marches. Elle qui aime chanter, le "la" sonne faux. Elle est figée, ne supporte plus qu’il l’appelle "petite" ou "qu’il l’approche pour "nous" enlever "notre" petit manteau". Elle ne supporte plus non plus maman qui ne comprend pas parce qu’elle n’écoute pas. Elle a son travail. "Je ne te reconnais plus ma fille !" Les mots, eux, restent bloqués, d’ailleurs, maman ne serait pas contente. "Si je parlais, qui pourrait m’aimer encore". Sur un ton résolument léger avec une pointe d’ironie, l’auteure aborde la pédophilie sans jamais la nommer, avec son lot de silences, désespoir, repli sur soi. Le happy-end n’efface pas l’horreur. "Ce qu’il y avait dans ma tête d’enfant, Paul-Ernest Henry me l’a volé pour tout le temps". C’est par le biais du théâtre que Camille réussira à dire son mal-être. Nul besoin de pathos ou subterfuges pleurnichards, le message est passé !
Niveau de lecture : collège
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