Les bottes rouges
Franz Bartelt
Gallimard, espace nord, 2006
Direction l’Est de la France, quelque part dans les Ardennes, dans un patelin où rien de palpitant ne se passe vraiment.
Correspondant local de presse, le narrateur en tire tout bénéfice pour se consacrer à ses deux passions : l’épluchage des pommes de terre (comme tout le monde le sait, c’est un légume métaphysique) et les discussions arrosées avec Basile son voisin.
"J’aurais mauvaise grâce de me plaindre : j’ai choisi le métier de localier par désespoir, comme on se suicide, ou comme on va s’enterrer dans un monastère après un chagrin d’amour. J’y suis terne et routinier, remplissant chaque jour six feuillets sur six sujets avec les mêmes mots, les mêmes formules, le même ton, les mêmes titres, ce qui ne me prend pas, en termes d’écriture, plus d’une quarantaine de minutes…"
Depuis 10 ans, les mêmes rituels se répètent jusqu’au jour où Basile manque à l’appel. Pendant 3 jours, notre localier va scruter la maison des voisins. "A travers l’averse, j’observe la maison des Matrin. Je ne sais pas si les gens ressemblent à leur maison et réciproquement, mais la maison des Matrin ressemble aux Matrin : elle a l’air con. Il est rare qu’un tas de cailloux puisse avoir l’air con. Celui que les Matrin habitent possède cette caractéristique, qui est moins un défaut qu’un style".
Basile va vite ressurgir, pour le moins nerveux et angoissé. Lui, le magasinier modèle et fier de l’être, fidèle à Rose depuis 20 ans n’a pas pu résister à l’appel de la chair en la personne d’une jeune stagiaire plantureuse. Bon évidemment, il ne sait pas comment ça s’est passé, ben voyons. "Je te jure que je n’espérais rien. Elle était appuyée contre une pile de boîtes contenant des tracteurs avec remorque. Je me trouvais devant elle à lui expliquer quelques ficelles du métier, et je ne voyais plus que sa bouche, ses grosses lèvres…" (c’est sûr, à côté, les tracteurs, c’est moins glamour). Bref, le Basile il est dans la mouise jusqu’au cou. Non content d’avoir plongé sa Rose (sa femme donc) dans une profonde dépression, voilà la stagiaire retrouvée suicidée. Oui, mais voilà, comme toutes les roses, La Rose du Basile a aussi des épines et a en outre en magasin une bonne dose de sadisme et de vengeance.
Bartelt nous propose ici un roman noir, décapant et désopilant comme souvent sous sa plume et une fois de plus j’applaudis.