L’enchanteur et illustrissime gâteau café-café d’Irina Sasson
Joëlle Tiano
Intervista, Les mues, 2007
Je viens de déguster "l’enchanteur et illustrissime gâteau café-café d’Irina Sasson". Il n’en reste pas une miette et pourtant, il flotte comme un goût de pas assez.
Qu’il était doux d’être auprès d’Irina et l’écouter encore et encore égrener ses souvenirs en distillant petit à petit la recette de sa douceur au café.
Ce livre est un réel enchantement, une histoire de femme, une histoire d’amours, l’histoire d’une vie tout simplement contée avec délicatesse. Nul besoin de longs discours pour décrire les joies, les peines, les attentes.
Irina est maintenant centenaire, Susan, sa petite fille est auprès d’elle. Elle se remémore sa jeunesse, son mariage avec Adriano,…
"Elle travaillait rue Saint-Honoré dans le magasin de soieries de son beau-frère. Un jour deux hommes étaient entrés…l’un était un grand jeune homme brun, très pâle de peau, l’autre un homme plus âgé, petit, à moustache.
Le soir au dîner, mon père m’a demandé si, au magasin, nous avions eu la visite de deux messieurs.
– Oui, ai-je répondu, un jeune et un vieux.
Alors tu as entendu ton père dire :
- le vieux n’a que quarante-cinq ans et tu es fiancée avec lui ".
… son exil à Batenda dans la colonie européenne, la guerre, ses parents, les camps, l’absence, l’attente du retour, l’espérance et puis… et puis les joies d’être mère. Une vie de femme avec ses hauts et ses bas, chaque évènement étant accueilli, vécu, fêté d’une façon identique : la confection du gâteau café-café.
Une vie rythmée au son du sucre mêlé aux jaunes d’œufs. "Je me souviens du bruit si particulier du mélange contre la cuillère de bois, un bruit très doux, un peu sourd, onctueux et comme poreux, donnant à l’oreille l’image de la densité du mélange… Une densité qui me rappelait celle des bêtises de Cambrai."
Récit à trois voix qui se font écho mêlant passé, présent et avenir, trois voix de femmes, chacune distinguée grâce à une typographie différente qui nous transportent de Batenda à cette chambre de l’hospice San Joao Antao dans laquelle Irina vit maintenant. Chaque jour, elle répète : "Pour un gâteau de huit convives, compter trois paquets de … "
Ce petit livre voyageur va continuer son voyage chez Cathulu. C’est avec un grand plaisir que je le fais passer. Merci Mous pour cette initiative ! Ce livre est un vrai coup de coeur, une réelle émotion qui m’a bien secouée et a ravivé de jolis souvenirs !
Et une fois n’est pas coutume, bravo à Joëlle Tiano !
Ps : j’ai cru voir quelques demandes de photos du fameux gâteau ! Je crains fort ne pas être à la hauteur…
Ps2 : Comme Mous, je garde le secret de la recette ! "Z'avez qu'à lire le livre"!!!