La taille d'un ange
Patrice Juiff
Albin Michel, 2008
Je le mets dans mes "auteurs favoris à suivre de près" ! En attendant le 3ème opus... C’était ma conclusion ici…et ça y est, le troisième est sorti en février dernier ! Patrice Juiff nous offre sur un plateau ce recueil de 9 nouvelles sur son thème de prédilection : la famille.
Pas de photo de famille réjouie de se trouver regroupée pour immortaliser le bonheur. Ici, ce sont 9 histoires coup de poing dont il est question. On entre dans le vif du sujet dès la première phrase : "Vince a pris douze ans de taule", " je viens de me disputer avec Olga", "papa nous tabasse tous les dimanche matin", "mon père est mort il y a à peine un mois et demi", "la première fois que j’ai vu ma mère, c’est sur une photo"...
Pas de fioritures, chaque nouvelle nous emporte donc au cœur de drames familiaux entre la violence d’un père et le silence d’une mère (Le dimanche matin), l’incompréhension en face d’une mère annonçant qu’elle veut présenter son nouvel amant à ses enfants un mois et demi après la mort du père. "J’ai du mal à ne pas me dire qu’il est cocu. Un mort cocu. Il n’est pas mort depuis assez longtemps pour supporter qu’on le remplace aussi vite. C’est un mort trop neuf. Merde. Un cocu trop neuf. Un mort cocu vraiment trop neuf." (Ma mère est vivante).
C’est aussi le constat qu’un jour l’amour s’en va "Reine et moi vivons encore ensemble parce que nous ne savons pas vivre autrement" (Chienne perdue) … alors qu’un autre naît "Quand j’ai rencontré Cécile, j’étais donc en train de crever. A petit feu. Comme tous les vieux" (Un cœur en commun).
Des histoires qui nous emmènent au cœur des foyers, bien calfeutrées derrière les volets. On est en plein drames. Ceux dus à l’alcool, ceux que l’on a tus et qui remontent soudain à la surface… Ce sont surtout des histoires d’amour qui charrient leur torrent d’émotions mais attention, on est loin du pathos et du misérabilisme ici. Tout est dans la retenue, les silences, les contradictions quand on aime...
Un panel de situations que l’on pourrait trouver dans les pages faits divers. Et ça secoue, inévitablement, car on s’y retrouve forcément quelque part.
C’est noir, on côtoie des milieux défavorisés dans la plupart des nouvelles, des banlieues peu attirantes mais là n’est pas l’essentiel. On est littéralement happé par ses destins et l’auteur fait mouche à chaque fois. Ma gorge s’est vraiment coincée une fois avec la dernière nouvelle "le premier vrai souvenir que j’ai d’elle" dans laquelle un gamin raconte sa sœur.
J’espère qu’avec cela, je ne vous aurais pas faire fuir car c’est à découvrir ! Les amateurs de nouvelles, tentez, c’est le moment !
Maintenant, j’attends le petit quatrième !...